Partage, transmission, expérience : rencontre autour d’un piment
Bien au-delà des frontières de l’Asie du Sud-Est, il existe un aliment qui, à lui seul, distingue la cuisine des tropiques de toutes les autres selon qu’il est utilisé comme condiment ou en très grande quantité : c’est bien sûr le piment.
Incontournable des cuisines thaïes, khmères ou lao, le piment agresse les palais inexpérimentés tandis qu’il chatouille délicieusement les autres. Tous inégaux face au piment ? Nous avons demandé à un spécialiste de la cuisine française et coréenne (réputée pour sa forte teneur en piment) de nous éclairer sur le sujet.
Propos recueillis par Antoine Besson
Si je vous parle du piment, à quoi associez-vous cet aliment ?
Le piment, je l’utilise quotidiennement dans ma sauce signature qui accompagne toutes les viandes servies dans mes restaurants, la sauce Ssamjang. C’est un condiment coréen traditionnel. Pâte épaisse et épicée, la sauce est faite de pâte miso et de gochujang, d’huile de sésame, d’oignon, d’ail, d’oignons verts et, éventuellement, de sucre brun.
En France, en dehors du piment d’Espelette plutôt doux, nous n’avons pas l’habitude de consommer beaucoup de piment. A l’inverse, en Asie, le piment est très répandu et relève de nombreux plats et saveurs. Quels sont vos conseils pour apprivoiser le piment ?
Il est vrai qu’en France, nous avons moins l’habitude de consommer du piment qu’en Asie. Au sein de mes restaurants, nous utilisons essentiellement du piment coréen. Pour le faire accepter et surtout apprécier à ma clientèle, nous l’associons à des saveurs plus douces, plus rondes. Nous l’utilisons par exemple pour assaisonner du guacamole ou du coleslaw.
Comment cuisiner le piment ? Avez-vous des préférences ? des conseils ou des astuces ?
Je n’ai pas d’astuces ou de conseils particuliers ; l’essentiel étant, comme pour chaque épice ou condiment, de l’utiliser avec parcimonie, à savoir pas en trop grande quantité pour ne pas masquer les saveurs des aliments mais suffisamment pour relever et sublimer un plat.
Avez-vous des anecdotes ou des souvenirs liés à cet aliment ?
J’ai peu de souvenirs liés à cet aliment. J’ai effectivement davantage de souvenirs du terroir français mais mon voyage en Corée de quelques mois, m’a permis d’apprivoiser cette saveur issue de mes origines, de mon héritage. C’est ainsi qu’instinctivement, j’ai souhaité revisiter la cuisine française à l’aide de twists Coréens.
Pour un amateur, le nombre de variétés de piments est parfois vertigineux. Comment choisir son piment ? Quelle est votre variété préférée et comment la cuisinez-vous ?
Effectivement, il existe beaucoup de variétés de piments, de toutes formes, couleurs et saveurs. Il n’est pas partie intégrante d’un plat, il vient soutenir des saveurs. L’idéal est ainsi de choisir son piment selon la recette élaborée, comme on le ferait avec des herbes aromatiques. Mais pour cela, il faut connaître le produit et il est vrai que le piment est méconnu du grand public.
Mon préféré est le Gochugaru, la poudre de piment rouge coréenne, que j’utilise dans ma sauce Ssamjang. Elle est la signature de nos plats de viandes. Ce condiment étant assez relevé, nous aimons le travailler afin de le rendre moins agressif en bouche, l’accompagner d’un jus de viande, d’une sauce aux agrumes… Ainsi il n’écrasera pas les autres ingrédients du plat du jour et les relèvera avec un bel équilibre.
Aujourd’hui, avec le recul de l’adulte, qu’avez-vous appris à l’école de fondamental qui vous sert tous les jours ?
J’étais, comme beaucoup d’enfants, de ceux qui pensent que l’école c’est « nul », ça « ne sert à rien » mais avec le recul de l’adulte, et de mon parcours professionnel, je pense que l’école permet d’avoir des fondations solides pour avancer dans la vie.
J’en retiens essentiellement des valeurs humaines, plutôt que des connaissances.
Vous êtes né en Corée du Sud mais avez grandi en France. Avez-vous toujours eu conscience de ce double héritage culturel ? Que signifie-t-il pour vous ?
Quand je suis arrivé en France, à l’âge de 7 ans, j’avais tout oublié de la Corée : la langue, le pays, les saveurs. Mais mes racines ont toujours été ancrées en moi. Je suis retourné dans mon pays natal à l’âge de 24 ans pour travailler dans un restaurant français à Séoul.
Je n’oublie pas d’où je viens, ma cuisine d’aujourd’hui reflète ce double ADN : français et coréen.
Comment en êtes-vous arrivé à choisir la cuisine et que représente-t-elle pour vous ?
Ayant grandi en Auvergne, je voulais être guide de haute-montagne. Mais c’est grâce à ma mère adoptive que j’ai découvert la cuisine traditionnelle française. Je me souviens aussi de mes vacances passées chez mes grands-parents, en pleine nature où j’allais à la cueillette de champignons et à des parties de pêche. Je dois ma vocation à ma famille, ils m’ont transmis cet esprit de convivialité autour de la table. C’est ce que représente pour moi la cuisine : le partage, la transmission, l’expérience.
Votre cuisine se veut une cuisine accessible à tous. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’est-ce qui se cache derrière ce désir de cuisiner pour tous et pas seulement les habitués des restaurants gastronomiques ?
Je veux partager avec le plus grand nombre mon univers gastronomique atypique et rendre accessible mon goût pour la cuisine créative de produits du terroir tout en gardant mon âme coréenne. J’aime rassembler, transmettre et partager, ce sont les valeurs que je veux véhiculer à travers ma cuisine et mes trois restaurants, grâce à mon équipe dont j’apprends chaque jour.
À 38 ans, Pierre Sang Boyer, finaliste de l’émission télévisée Top Chef en 2011, est à la tête de trois restaurants situés dans le onzième arrondissement de Paris. Il y propose une cuisine française souvent empreinte de saveurs coréennes dans des bistrots accessibles chez Pierre Sang in Oberkampf (55 Rue Oberkampf, 75011 Paris) et Pierre Sang on Gambey (6 rue Gambey, 75011 Paris). Sa troisième adresse : Signature by Pierre Sang (8 rue Gambey, 75011) est, quant à elle, une table gastronomique.
Pour apprivoiser le piment, Pierre Sang vous propose la recette de l’un de ses plats signatures : la côte de bœuf, lentilles kimchi sauce Ssamjang !
Côte de bœuf
Ingrédients :
1 côte de bœuf de 1,2kg
1 filet d’huile de tournesol (10cl)
2 gousses d’ail
2 branches de thym
2 feuilles de laurier
20g de beurre
Sel
Poivre
Assaisonnez la viande avec le sel, le poivre, l’ail en tranches et l’huile de tournesol.
Posez dessus les feuilles de laurier et les branches de thym.
Saisissez la viande dans une poêle avec le beurre.
Lentilles kimchi
Ingrédients :
250g de lentilles vertes du Puy
200g de kimchi* pimenté
1 chou chinois
70g de gros sel
1L d’eau
30g de riz
30cl d’eau
1 oignon
1 pomme nashi
2 gousses d’ail
25g de gingembre
80g de sauce d’anchois
30g de petites crevettes
500g de piment coréen en poudre
Piment en poudre, très coloré et assez piquant.
100g de beurre
Réalisation du kimchi :
Coupez le chou en lamelles dans le sens de la longueur. Verser un litre d’eau tiède dans un saladier et ajoutez le gros sel. Mélangez, puis plongez-y le chou. Laissez dégorger pendant une nuit. Le lendemain, rincez, puis égouttez.
Faites cuire le riz dans 30cl d’eau bouillante salée, à feu doux. Lorsque le riz est cuit, mixez-le avec son eau de cuisson. Laissez reposer 15 min.
Epluchez l’oignon, la pomme, les gousses d’ail et le gingembre.
Mixez-les avec la sauce d’anchois et le piment coréen jusqu’à l’obtention d’un mélange homogène.
Mélangez cette pâte avec la soupe de riz et les petites crevettes.
Enduisez soigneusement le chou de cette marinade.
Stockez dans un grand récipient fermant hermétiquement.
Attention, il ne doit pas être plein, sinon la préparation risque de déborder car du jus va se former pendant la fermentation. Appuyez fermement pour qu’il n’y ait pas d’air à l’intérieur. Laissez fermenter 2 jours à température ambiante, puis stockez dans le réfrigérateur pendant 4 à 10 jours.
Coupez le kimchi en brunoise. Mettez-le dans une casserole avec les lentilles et couvrez d’eau et de beurre.
Faites cuire à petit bouillon pendant 20 à 30 min.
Egouttez, puis réservez.
Sauce Ssamjang
Ingrédients :
150g de doenjang (pâte de soja fermentée)
Condiment coréen traditionnel, réalisé à partir de pâte de soja fermentée, qui s’achète dans les épiceries asiatiques.
150g de gochujang (pâte de piment)
Condiment coréen fermenté épicé, à acheter dans les épiceries asiatiques.
1 filet d’huile de sésame
1 filet de jus de yuja
Agrume asiatique au goût acidulé et subtil. Son nom japonais est « yuzu »
Mélangez tous les ingrédients.
A table !! Envoyez-nous les photos de vos réalisations sur magazine@enfantsdumekong.com !
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