De l’extérieur du pays, le Mouvement de Désobéissance Civile (CDM) a donné l’impression que toute la société birmane refusait la prise de pouvoir de l’armée.
L’ampleur du rejet du coup d’État militaire a été à la hauteur du soutien accordé par les citoyens à la Ligue Nationale pour la Démocratie (NLD) lors des dernières élections générales du 8 novembre 2020. On peut d’ailleurs noter que les combats les plus violents se déroulent aujourd’hui dans des régions (Magway, Sagaing) et État (Chin) où le parti de Daw Aung San Suu Kyi a remporté un triomphe électoral en 2020, tant à l’élection des députés nationaux que provinciaux.
La contestation du coup de force militaire est également venue de l’appareil d’État lui-même. Symbole s’il en est, le premier manifestant pacifique abattu par les forces de l’ordre l’a été le 9 février dans la capitale Nay Pyi Taw. Dès le début du putsch, l’un des aiguillons de la contestation a été le corps médical. C’est de Mandalay et sa faculté de médecine qu’est parti le Mouvement de Désobéissance Civile (CDM). Il est vrai que depuis l’arrivée au pouvoir de la NLD, les secteurs de la santé et de l’éducation ont bénéficié de moyens nouveaux alors que ces politiques publiques furent délaissées pendant des années par les généraux au pouvoir.
Le CDM a démontré que la gronde populaire du printemps 2021 n’était pas seulement la révolte d’une jeunesse connectée à Facebook, urbaine et privilégiée, elle était l’expression d’un mécontentement populaire, y compris de cadres installés ayant travaillé parfois très étroitement avec les régimes militaires antérieurs. Le ralliement spectaculaire à l’opposition du représentant permanent de la Birmanie aux Nations unies en a été un des signes.
Au fil des mois, les manifestations CDM ont pris de nouveaux tours. Le 10 décembre 2021 et le 1er février 2022, elles se sont traduites avec succès par des opérations villes-mortes à l’échelle de tout le pays. Elles s’accompagnent d’opérations de boycott de produits fabriqués par des entreprises détenues par l’armée (abonnement de téléphonie mobile, bière, cigarettes…) voire de collectes de fonds (bons du trésor, loterie nationale). La junte n’arrive pas à juguler cette opposition et à trouver les parades à des formes d’expression évolutives et jusqu’ici inusitées en Birmanie.