Il s’agit donc pour le Président Duterte et son gouvernement d’une victoire importante puisque la paix dans le sud des Philippines était l’une des priorités de son mandat. Cependant, si la nouvelle autonomie est acquise, elle n’est pas à l’abri d’un sabotage.
En effet, les groupes armés dans cette région sont nombreux et ne sont pas tous mus par les mêmes intérêts. Outre le MILF qui a accepté lors du processus de paix de rendre les armes, nombreux sont ceux qui, à l’origine, se sont opposés au processus de paix avec le gouvernement. Face à la création imminente de la BARMM, certains d’entre eux semblent cependant s’aligner aujourd’hui sur les positions du MILF.
Ainsi, par exemple, sur les trois factions qui forment le Bangsamoro Islamic Freedom Fighters (BIFF), un groupe dissident du MILF depuis 2010, deux factions pourraient accepter de reconnaître la BARMM. La troisième faction, affiliée à Daech et dirigée par le commandant Turayfie, refuse toute communication avec le MILF. Le commandant Turayfie est responsable de deux attentats dans le centre de Mindanao, le 28 août et le 2 septembre 2018, qui a fait cinq morts et une quarantaine de blessés. Par ailleurs, des émissaires du MILF ont été envoyés pour rencontrer Nur Misuari, leader historique du Front moro de libération nationale (le MNLF, l’autre grande entité indépendantiste qui avait négocié le premier accord de paix avec le gouvernement Ramos en 1996 et avait obtenu quelques avancées pour l’autonomie de l’ARMM en 2001) pour le convaincre de reconnaître la BARMM.
Ces efforts de réunification des principaux groupes rebelles, MNLF et MILF, menés par les négociateurs de l’OCI depuis les années 1990, ont toujours été vains. Seules deux factions du MNLF (dirigées par Muslimin Sema et Yusoph Jikiri) ont travaillé avec le MILF dans le processus d’élaboration de la BOL.