« L’homme se nourrit de liens »

Vous le savez peut-être mais cette semaine est une semaine spéciale puisqu’elle a commencé, Dimanche dernier, avec la 104ème Journée mondiale du migrant et du réfugié. Les messages de solidarité et de compassion ont été nombreux à cette occasion. Les appels à l’aide aussi.

 

Les messages de solidarité et de compassion ont été nombreux à cette occasion. Les appels à l’aide aussi. Bien entendu, lorsque nous parlons des réfugiés, nous pensons en premier lieu, et avec raison, aux drames qui se déroulent si près de nos côtes en méditerranée ou en Europe où tant d’hommes et de femmes cherchent un abri, un refuge, une nouvelle terre pour tout recommencer. Mais prenons garde à ne pas oublier ceux qui vivent ces même épreuves, loin des regards et des médias qui cristallisent l’attention.

Il existe encore de nombreux endroits dans le monde où des familles entières sont séparées par la misère et la violence. Dans mes reportages pour Enfants du Mékong en Asie où il n’y a plus de conflit officiel, j’ai croisé ces dernières années des paysans Vietnamiens issus des ethnies minoritaires Jaraï qui vivent sur une terre plus dure et sèche que le roc, déplacés là il y a des décennies par l’absurdité d’une administration utopique. D’autres déplacés internes Kachin qui ne bénéficient pas du statut de réfugiés parce qu’ils n’ont pas fui leur pays mais vivent encore en Birmanie dans un contexte de guerre civile et d’affrontements presque quotidiens. Ils sont dans des camps et vivent au jour le jour. En Thaïlande, des milliers de réfugiés débarquent chaque année profitant d’un visa pas cher. Ils y sont bien plus nombreux que dans nos capitales européennes alors même que la Thaïlande ne reconnait pas le statut de réfugié délivré par l’ONU. Ils viennent du Pakistan, de Syrie, du Vietnam, du Rwanda ou d’ailleurs et vivent dans la peur d’être arrêtés. Ils sont des milliers à chercher un refuge. A être des réfugiés même si parfois le dictionnaire ONUsien les exclut de leur définition.

 

Une famille à Kontum ©EdM

 

Enfants du Mékong est une ONG qui est née et s’est développée au contact des enfants des rues de Vientiane devenus les réfugiés politiques de la crise des boats et land people de 1975 en Thaïlande. C’est l’amitié avec ces familles qui a été notre moteur et qui l’est encore. Cette amitié nous a permis de prendre la mesure de certaines choses :

D’abord, il faut les aimer. Leur dire qu’on ne les oublie pas et tenir notre promesse.

Ensuite, il faut les aider là où ils sont. Ne pas croire que nous sommes dépositaires de la solution : les réfugiés sont souvent maîtres de leur destin et déjà très avancés dans la connaissance de ce qu’il faudrait faire pour s’en sortir. Ils ne nous ont pas attendus. Combien parmi eux sont des porteurs d’espoir pour leur communauté. Ne leur manque parfois que les moyens. Nous ne sommes pas là pour les priver de leur liberté ni de leur discernement : nous ne décidons pas à leur place.

Mais cela ne signifie pas pour autant qu’il ne faut rien faire. Par où commencer quand on a tout perdu ? Aidons-les à reconstruire un foyer, un village, un pays en leur donnant les moyens. Cela passe parfois par des choses simples et pourtant essentielles comme l’éducation.

 

Jeune vietnamienne ©Olivier

 

 

Enfin, soyons fidèles car si nous sommes là par amour de nos frères, par fraternité et non pas dans un contexte de réponse automatique à une crise, notre fidélité fera la différence ! La fécondité de nos actes n’en sera que plus grande. Nous ne les oublions pas. Nous ne vous oublions pas ! L’homme ne se nourrit pas que de pain, il a aussi besoin de liens ! » 

Antoine Besson pour Enfants du Mékong