La survie des Karens
« Connaissez-vous cette petite ethnie thibéto birmane d’environ 4 à 7 millions d’habitants répartis entre la Birmanie et la Thaïlande ? Oui ? Vous avez de la chance ou vous êtes bien informés ! Pour les autres, les karens du Nord de la Thaïlande vivent un dilemme grave. Stigmatisés par les Thaï comme un peuple montagnard et rustre, ils viennent de la Birmanie voisine d’où ils ont fui la guerre et vivent dans des camps de réfugiés ; d’autres sont arrivés bien plus tôt en Thaïlande à l’époque du Siam et vivent dans des villages reculés au cœur de la forêt.
J’en parlais il y a quelques temps avec un ami prêtre, le père Alain, MEP dévoué à l’évangélisation des Karens dans le Nord de la Thaïlande. Il me racontait les défis immenses que rencontrent les Karens aujourd’hui pour défendre leur identité. « Ce qui m’impressionne à chaque fois, c’est de constater que ce tout petit peuple perdu au fin fond des forêts porte en lui les questions fondamentales de nos sociétés modernes »
Le père Alain en identifiait trois : l’identité, l’engagement politique et la survie économique. « Les Karen rencontrent la modernité et ils se rendent compte qu’ils sont en train de tout perdre de leur vie, de leur culture. Il n’y a souvent plus de jeunes dans les villages et les grands parents élèvent seuls leurs petits enfants. Tous les autres sont partis en ville. Où est l’avenir dans ce contexte ? Que va-t-il rester du peuple Karen d’ici une ou deux générations ? Comment concilier la modernité et les racines, l’identité culturelle ? Que sauver et transmettre ? Cette question va bien au-delà du simple peuple Karen. Tout le monde se la pose. Que restera-t-il de notre humanité ? » martellait-il en s’inquiétant réellement de l’avenir.
Même constat sur le plan de l’engagement politique. Si les Karens représentent une part non négligeable de la population dans l’Etat de Mae Sot dans le Nord Ouest de la Thaïlande où se situe à la fois de villages Karens et des camps de réfugiés, ils ne sont quasiment pas représentés dans les instances politiques. Comment mener une vraie réflexion sur leur avenir sans pouvoir politique ?
« Tous les choix de ce peuple sont conditionnés par la survie économique : comment s’intégrer dans un monde qui est un monde d’argent ? Ils ne veulent pas quitter leur village mais souvent ils n’ont pas d’autre choix ! »
Le constat est problématique mais le pasteur refuse de ne s’en tenir qu’à l’énoncé du problème. Il envisage aussi les solutions et les ressources qui pourraient permettre aux Karens de s’en sortir. C’est le sens de sa mission : « La réponse à ces questions est de notre responsabilité à nous catholiques. Si Jésus est venu sauver tout l’homme, il est également venu sauver toutes les cultures. » La fraternité et la solidarité nous oblige. Nous ne pouvons ignorer le combat des Karens. Surtout quand il est si proche de nos propres préoccupations quotidiennes. »
Pour soutenir ce peuple minoritaire, rendez-vous ici !